Je m'appelle Alphange.
Alphange Cohen.
J'ai 26 ans et je suis parisienne.
Ma particularité est que
je ne contrôle plus ma vie.
En peu de temps,
2 années et demi pour être exacte,
j'ai coupé les ficelles à marionnettes
de mon existence.
Mais j'assume,
c'est mon choix,
et j'assume.
J'ai,
pour ainsi dire,
une vie relativement saine dans l'ensemble.
Je travaille,
énormément.
Je commence même à me faire ma place
en tant qu'artiste peintre.
Mes tableaux se vendent,
mes tableaux s'arrachent même,
pour certains.
Je vis dans un bel appartement
près de la rue Montorgueil.
Héritage de ma grand-mère,
figure emblématique
des soirées parisiennes dans les années 50.
J'ai un physique.
Bien que peu dans les normes
de beauté actuelles.
Mais,
comme on me le dit,
" j'ai de la gueule ".
Je suis enthousiaste,
gaie,
heureuse de vivre,
généreuse et souriante.
Je ne me vois pas énormément de défauts.
Du moins, pas qui rebuteraient les hommes.
La preuve en est que,
j'ai su attirer dans mes bras,
les plus convoités des hommes de ma génération.
Et de d'autres générations collées à la mienne.
Je suis une femme à homme.
Je suis une femme qui sait profiter
de ce que la vie lui offre.
Malgré tout,
aujourd'hui,
je me sens comme prisonnière de cette liberté.
En effet,
depuis deux ans et des poussières,
je manque de respect à mon égard.
Ces deux dernières années sont pour moi,
comme un tourbillon d'hommes,
de sexe et de rencontres.
Tout à commencé,
un vendredi de juin.
Je menais, de main de maître,
une relation avec un homme fabuleux.
Voila déjà un an qu'il me comblait
et que nous nous réjouissions des découvertes
omniprésentes de l’un pour l’autre.
J'étais totalement et éperdument
amourachée de ce garçon.
Otello était ma raison de vivre,
ce qui faisait battre mon coeur.
C'est pourquoi,
aujourd'hui encore,
je ne comprend pas.
Je ne comprend pas ce qu'il m'est passé par la tête.
C'est assez fou,
mais,
c'est le jour de notre anniversaire de rencontre que,
j'ai fais la rencontre de Peppy.
Un italien, fougueux, macho, passionné d'architecture
et sans aucune retenu.
Prés de deux ans après, je réussi encore
à gérer ces deux relations si différentes.
Il est vrai que d'avoir une double vie peut être gérable,
le soucis étant que,
je ne m'en suis pas arrêtée là.
J'ai enchainé les rencontres et relations
avec toutes sortes d'hommes plus différents les uns que les autres.
A croire même,
que je les choisissais pour leurs différences de caractère.
Pas un ne ressemblait aux autres.
Peut être qu'inconsciemment,
cela me rassurait,
me dire qu'ils ne pourraient se connaitre,
ou du moins se fréquenter ;
étant de milieux, d'éducations et de valeurs différentes.
Je voguais entre Otello, Peppy, Thomass, Gastien, Paul-Etienne....
Un musulman, un juif, un protestant, un athée...
Un intellectuel, un sportif, un cuisinier, un styliste...
Pour être tout à fais honnête,
j'ai même émis certains doutes quand à l'orientation sexuelle de Fabian,
qui,
n'a pas encore réussi à assumer sa forte part de féminité.
Avec chacun d'eux je restais moi même.
En m'adaptant à leur rythme de vie.
Aucun, jamais ne s'est posé de question.
Aucun n'a jamais émit la moindre jalousie.
Il faut dire aussi, que chaque moment passé avec l'un ou l'autre
me fermait les yeux sur le reste du monde.
Nous n'étions que deux sur terre et plus rien ne
pouvait me sortir de cette étourdissement amoureux…
Jusqu'à leur départ.
Ils avaient tous les clés de mon appartement,
ce qui m'excitait au plus haut point,
car je ne savais jamais lequel m'attendrait chez moi chaque soir en rentrant.
Forcément, tout cela me demandait une certaine flexibilité de caractère,
ainsi qu'une grande adaptation.
Mais de vivre avec tout ces hommes me procurais une telle richesse
que j'ai rapidement su que je ne pourrais me passer d'aucun.
Deux années et demi que cette vie m'appartient.
Deux années qui éblouissent tellement ma vision du monde
que je ne me suis même pas aperçue que je cohabite avec Otello.
Il a emménagé dans mon appartement,
bien assez grand pour deux,
ou plus.
Et c'est assez étrange, car il n'y a que deux jours de cela,
que je me suis enfin rendu compte que je recevais, également,
du courrier pour d'autres de mes petits amis.
Fabian recevait des invitations pour animer des soirées gays dans Le Marais
(ce qui accentua mes questionnements, mais après tout il n'a qu’a
assumer son côté bisexuel et ça m'ira très bien, tant que je le garde prés de moi).
Mathou les factures de ses séances chez son psy,
Gaz, quand à lui, avait du donné mon adresse à tous ses amis partis en vacances,
et je fus bombarder de cartes postales des quatre coins du monde.
Paul-Etienne s'est même fait livrer son nouvel IPhone à mon adresse.
Parfois même, j'entendais des messages destinés à Slater sur mon répondeur.
Ne restais que le courrier d'Otello composé à 90% de factures,
en toute logique,
vu que vivre ensemble implique bien des contraintes.
J'ai donc,
bien normalement,
commencé à me poser des questions.
Pourquoi diable donnaient ils tous mon adresse?
Serais je tombée dans un gang de trafiquants?
Toutes sortes de réponses me sont venues à l'esprit,
jusqu'à ce que la simplicité me saute aux yeux.
C'est donc, un à un que je leur ai posé la question.
Et unanimement, comme préenregistrées,
j'ai reçu une bonne vingtaine de fois,
la même réponse:
" Et bien Alphange, je vis ici, où donc voudrais tu que je reçoive mon courrier?"
s'ensuivit des questions sur ma santé,
sur ma fatigue et mon état de stress.
Puis des affirmations,
comme quoi je travaillais trop,
que je devrais prendre des vacances...
Je commençais à me perdre dans ces méandres
de personnalité.
Et aujourd'hui, pour la première fois,
j'ai décidé de stopper net toutes ces histoires.
De ne garder que l'unique et seul sens à ma vie :
Otello.
Avant de décider des horaires et jours adéquates à chacun
pour organiser mes ruptures j'ai pris,
en exemple,
ces émissions de télé réalité où les jury étalent les photos des candidats
afin de mieux faire leur choix.
Mon choix était fait.
Mais revoir chacun de leur visage,
me remémorer,
chacun des moments passés avec l'un, puis l'autre,
m'aiderait à rompre.
Pendant une bonne heure et demi j'entrepris donc
de dénicher, dans mes affaires,
des photos de chacun.
Photo d'identité,
photos de nos escapades en Belgique, en Espagne, dans le sud, en Slovénie etc…
Photo prise au réveil dans mon lit de draps blanc,
photo chipée dans son portefeuille,
Photo imprimée sur du papier mat légèrement pailleté...
J'en avais une pyramide entière,
de photos.
De souvenirs.
De bonheur.
Rien que de penser que je devais me défaire d'un de ces hommes
me déchirait le coeur.
J'ai commencé à étaler les photos,
les unes prés des autres et...
Et là je n'ai pas compris.
Sur chaque photo,
il y avait certes, un style différent :
le rocker,
l’intello coincé,
à contrario le totalement branché,
mais,
sur chacune de toutes ces centaines de photos,
revenait,
inlassablement,
le magique et magnifique visage
d'Otello.